Rose-Marie François

Rose-Marie François Poems

Au bout de mes doigts, père,
tes doigts
que j'effleure
presque...
et l'envie des cerises
mûres
trop haut dans le bleu de l'arbre.
Tu m'as hissée jusqu'au miroir...
Ce rouge ce rire à mes oreilles
la pulpe de tes lèvres...
Nous aurions dû savoir
que le ciel
commençait au ras de l'herbe.
...

The tips of my fingers, Father,
barely touch the tips of yours
and I long for the ripe cherries
far out of reach in the blue branches.
You have lifted me to the mirror.
This red this laughter in my ears
the luscious flesh of your lips.
We should have known
that sky
began at the level of grass.

English translation: Phillip Sterling
...

Le singe au zoo récite le journal
d'une enfant sage dont chaque page
- pas un jour ne manque -
commençait par les mots :
‘j'ai été à la messe'.
Neuf ans, sans une faute de grammaire
une écriture maîtrisée dans la routine des poupées,
des coutures, des devoirs,
des obéissances.
Le singe dans sa cage ouvre
une bouche aux dents innombrables
tel un requin échoué sur le sable à l'endroit où l'enfant écrit
comme elle aimait aller courir dans la forêt
courir et crier, crier, crier…

(Chimpanzé, 1955, Staatsgalerie, Stuttgart)
...

Ein Affe im Zoo liest aus dem Tagebuch
eines braven Kindes vor :
jede Seite - es fehlt kein einziger Tag -
fing so an : « Ich war bei der Messe. »
Neun Jahre jung,
keinen Grammatikfehler.
Eine beherrschte Schrift
in der Routine der Puppen,
der Näharbeit, der Schulaufgaben,
der Gehorsamkeit.
Im Käfig sperrt der Affe
das Maul auf : unzählige Zähne
wie ein gestrandeter Haifisch
da, wo das Kind schreibt
wie gerne es im Walde rennen wollte,
rennen und lauthals schreien,
schreien, schreien

Aus dem Fanzösischen von der Autorin und Thomas Christoph Ottmer
...

[…]

In Wilrijk vragen ze
naar mijn muziekinstrument.
Ik speel stem
in verschillende talen.
Ik speel taal
met verschillende pennen.

Je joue de la voix
en diverses langues.
Je joue de la langue
sur diverses plumes.
Réponse à qui m'interrogeait
sur mon instrument de musique.
...

On disait :
Les grands bois sombres
et on tremblait.

Rien
à l'heure opaque
que les branches qui craquent -
résine surchauffée.

L'oeil agrandi cherche une luciole,
l'appoint d'une pensée.

Mais au clair du néon
les sapins vont l'amble.
La nuit ne fait plus peur
ni l'ogre.

Les enfants eux-mêmes
sont des tueurs.
...

We'd say
the big dark woods
and shiver.

Nothing
at the opaque hour
but creaking branches,
overheated reesin.

The eye grown wide
searches for a firefly,
the support of a thougt.

But by neonlight
fir trees amble.
Night no longer terrifies,
nor does the oger.

For
kids are killers.

Transl. Judy Cochran and Anne-Marie Glasheen
...

On n'a plus le temps ? On n'a pas le temps…
La poésie traverse le temps !
Passe à travers le temps… passe au travers du temps !
Écoutez comme, un jour,
au Musée National de Copenhague,
la Poésie me fait d'une MOMIE
une merveilleuse AMIE :
FROMENT, MIEL, AIRELLES
A dix-huit ans on l'a couchée
dans un chêne évidé.
A portée de la main
une coupe d'hydromel -
froment, miel, airelles -
près du squelette calciné
d'un enfant en bas âge.
La vitrine m'empêche
de toucher tes cheveux
ou le bois rugueux du couvercle
suspendu
à nos yeux profanateurs.
Tu as bientôt quatre mille ans.
Morte au matin des roses,
tu n'as pas pu vieillir jusqu'à mon âge.
Ai-je en outils, en légendes, en voyages,
quatre mille ans de plus que toi?
Ces lanières de cuir tressé,
jupe arrêtée sur tes cuisses...
Tu dansais au soleil...
Entre, assieds-toi, que je t'écoute...
Ils disent de cet enfant :
« Peut-être un sacrifice rituel ? »
Tu ris dans tes larmes.
Que tes yeux sont vert pâle,
ils ne le sauront pas.
Quand on a retiré le petit du brasier
où il était tombé, fasciné par la flamme,
tu l'as suivi dans l'autre monde,
c'est cela?
(Comment s'échangent nos langues?
Quel est notre parler commun?)
La traversée se fait dans la tempête.
Comme aux pêcheurs pour les poissons d'argent,
on t'a donné un filet
pour tes cheveux.
Je tends la main vers eux, blondeur
cendrée par les jours d'ombre ;
j'ai ton âge et tu me souris.
Mes doigts ne t'atteignent pas,
c'est toi qui me touches.
Etait-ce ton enfant,
ton petit frère,
celui à qui tu ne pouvais survivre?
Et à quoi pensais-tu
quand les haches tombaient:
au chêne en sueur, à ses racines?
Qu'à son tour il ne te survivrait pas?
Et où rompre la chaîne
de ces morts concertées?
Pas encore… quatre mille ans plus tard
puisque
tu me tends la main.
Ecoute,
tu me prêteras le couvercle
et nos barques jumelles
s'en iront côte à côte.
Nos filets dérisoires
tombent au fond du temps.
Qu'y a-t-il à prendre
dans la tempête ultime?
Tes yeux sont verts, très pâles.
Ils ne les ont pas vus.
...

Mit achtzehn Jahren hat man sie
in eine ausgeholte Eiche gelegt.
In Reichweite
ein Becher Met
Weizen, Honig, Heidelbeeren
neben dem verkohlten Skelett
eines kleinen Kindes.
Die Glasvitrine hindert mich
die Haare zu berühren
oder das rauhe Holz
des vor unsrem entweihenden Blick
offengehaltenen Deckels.
Bald bist du viertausend Jahre alt.
Am Morgen der Rosen gestorben,
hast du nicht so alt wie ich werden können.
Bin ich dir an Geräten, Legenden und Reisen
viertausend Jahre voraus ?
Diese geflochtenen Lederriemen,
der Rock bis zu den Schenkeln…
Du tanzest in der Sonne…
Tritt ein, nimm Platz, ich will dich zuhören.
Von diesem Kind sagen sie :
« Vielleicht ein rituelles Opfer. »
Weinend lächelst du.
Dass deine Augen blassgrün sind,
werden sie nicht erfahren.
Als man den Kleinen aus der Glut zog,
in die er, von der Flamme fasziniert, gefallen war,
bist du ihm in die andere Welt gefolgt,
nicht wahr ?
(Wo treffen sich unsere Sprachen ?
Welche Wörter sind uns gemeinsam ?)
Die Überfahrt bei Sturm und Regen.
Wie den Fischern für ihren silbernen Fang,
gab man dir ein Netz
für deine Haare.
Ich strecke die Hand nach ihnen aus,
nach ihrem von den Schattentagen aschgrauen Blond ;
ich bin so jung wie du, und du lächelst mir zu.
Meine Finger erreichen dich nicht,
du bist es, die mich berührt.
War es dein Sohn,
dein kleiner Bruder,
den du nicht
überleben konntest ?
Woran dachtest du,
als die Äxte niederstürzten :
an die schwitzende Eiche, an ihre Wurzeln ?
Dass sie nun ihrerseits dich nicht überleben würde ?
Und wann kann die Kette
all der geplanten Tode abgebrochen werden ?
Auch viertausend Jahre später noch nicht,
da du mir
die Hand reichst.
Pass mal auf !
Du wirst mir den Deckel leihen,
und unsere Zwillingsboote
fahren Seite an Seite hinaus.
Unsere armseligen Netze
fallen auf den Grund der Zeit.
Was gibt es zu fangen
im letzten Sturm ?
Deine Augen sind grün, sehr blass.
Sie haben sie nicht gesehen.

Aus dem Französischen von Rüdiger Fischer.
...

Notre Mère qui es la terre
Que ton nom soit chanté
Que nos pas te révèlent
Que nos mains te caressent
En caressant tes fruits.
Donne-nous aujourd'hui
les blés de ton amour.
Ne brise pas nos ailes
comme nous brisons celles
des êtres qui nous aiment
ou qui nous ont aimés.
Mais fais-nous clair danser
sur tes plaines cicatrisées
et garde-nous
dans les vallées de ton giron
l'herbe d'un printemps du pardon
où retourner en cendre
ensemble.
Amen.
...

Mutter unser,
die Du bist die Erde,
besungen werde Dein Name.
Mag unser Gang
Dich erblühen lassen.
Mag unsre Hand
Deine Früchte streicheln.
Die Kornfelder Deiner Liebe
gib uns heute.
Brich unsre Flügel nicht
so wie wir die Flügel brechen
derer, die uns lieben
oder geliebt haben, sondern
laß uns auf Deinen geheilten Fluren
hellauf tanzen
und bewahre uns
in den Tälern Deines Schoßes
Frühlingswiesen der Verzeihung,
wo wir am Abend
zusammen
wieder zu Asche werden.
Amen
...

C'est un parc au soleil
qui éclate de rire.
On s'y laisse prendre.
On prend pour cris de joie
le pas lourd des péans,
les clous heurtant la pierre.
Les sentiers s'incurvent, se
déhanchent, secouent la lumière.
Crissements de gravier, adieu.
On peut courir mais pas s'enfuir.
Le labyrinthe est bétonné.
Nul ne peut en issir
sans d'abord s'ensevelir.
Quand le parc se réveillera,
à l'extinction des feux grégeois,
celui qui compte les morts dira que
la suite des nombres est illimitée.
...

13.

Ein Park in der Sonne
bricht in Lachen aus.
Schon ist man gefangen.
Wie Freudengeschrei
klingen die Schlachtenlieder,
die Nagelstiefeln auf den Steinen.
Pfade biegen um, Wege schwingen sich
und schütteln das Licht.
Kieselgeknirsch. Ade !
Rennen geht, fliehen nicht :
Der Irrgarten ist betoniert.
Keiner kommt ‘raus, ausser begraben.
Wenn der Park erwacht,
löscht den Zapfenstreich,
kommt ein Totenzähler
und verkündet :
die Zahlenfolge nimmt kein Ende.

Deutsche Fassung von der Autorin und Thomas Christoph Ottmer
...

14.

Je descends du train
Personne pour m'attendre
J'ai perdu mes valises
On a volé mon sac
Cette foule où j'étouffe, la ville…
Je reconnais un canal
sa double rangée d'arbres
vert passé, gris passé,
immobile, absent, tranquille,
vide, figé, comme peint…
Elles pâlissent,
les couleurs de notre nuit,
comme les étoiles
à l'approche du jour.
J'entends le pinson
Notre hiver s'en va
Ou bien -
témoin cette rose ne janvier -
notre hiver n'a jamais existé.
...

15.

I step off the train.
No one is waiting for me
I have lost my luggage
My bag has been stolen
The crowd is choking me, the town -
I will recognize a canal
lined with two rows of trees
a faded green, a faded grey,
quiet, absent, still,
empty, taut, a canvas -
The colours of our night
are fading
like stars
at break of day.
I hear a finch singing:
our winter is ending
Unless -
a rose blowing in January -
our winter never was.

English translation: Christine Pagnoulle and Phillip Sterling
...

16.

Ich steige aus dem Zug
Niemand erwartet mich
Ich hab meine Koffer verloren
Man hat meine Tasche gestohlen
Diese Menge, ich ersticke, die Stadt…
Ich erkenne einen Kanal wieder
seine doppelte Baumreihe
welkes Grün, welkes Grau
reglos, abwesend, still
leer, erstarrt, wie gemalt…
Die Farben unserer Nacht
erblassen
wie die Sterne
beim Nahen des Tages.
Ich höre den Finken
Unser Winter geht
Oder aber -
wie diese Rose im Januar zeigt -
es gab nie unseren Winter.

Aus dem Französischen von Rüdiger Fischer
...

On patauge dans la limaille que rouille à sang un soleil bas.
Entre les cornes du taureau, la femme divisée revient du rapt.
Laver les signes, les plis pris aux barrières, sueurs, poussières, traces ténues de la méfiance prête à rebondir.
Fourbir les bulbes, sauver des pluies acerbes les flèches, les dentelles.
Se réconcilier avant de mourir d'une tierce main, mercenaire impatiente à nos soldes, frères en froid. Renoncer à faire les comptes, qui a loué le premier cavalier, fourni la balance, la jument rouge, l'étalon noir.
[…]
Entre les lèvres métalliques, toutes-boîtes, la langue s'use à la râpe des réclames.
[…]
Serons-nous du voyage dès l'ouverture des frontières ou accueillerons-nous les assoiffés? Panserons-nous leurs plaies à l'arrachement des cils? L'ignorance rend envieux. Mirages amoncelés, la pluie la boue sur les contours fait chanceler les lumières.
A cheval sur la chanlatte, les pieds dans le courant glacé, on voit passer les chimères, les mousses égorgés, les agendas couverts de feuilles.
*
Le pays surgira du livre, de la carte, de la mémoire, nous sautera aux yeux, au cou, au visage. Diablotin à ressort ou patriarche sculpté, billet crasseux ou effigie maternelle, qui pourra le prévoir?
Quelle génération aura l'heur de rentrer, trouver le lieu sous le béton, brûler les broussailles, enneiger les fosses, poser la main sur la plus haute pierre?
...

We ploeteren door vijlsel, bloedrood geroest door een laaghangende zon. Tussen de horens van de stier keert de verdeelde vrouw van de schaking terug.

De tekenen wassen, de gewoonten bij de slagbomen, het zweet, het stof, de iele sporen van het wantrouwen dat altijd weer kan oplaaien.
De torenkoepels oppoetsen, de spitsen en de kantelen redden van de zure regen.

Zich verzoenen alvorens door andermans hand te sterven, de ongeduldige huurling die wij betalen, broers in onmin. Niet langer de rekeningen opmaken : wie de eerste ruiter heeft ingehuurd, de weegschaal heeft geleverd, de rode merrie, de zwarte hengst.
*
Tussen de metalieke brievenbuslippen slijten tong en taal op de rasp van reclamedrukwerk.
*
Zullen we de reis aanvatten zodra de grenzen opengaan of zullen we de dorstigen onthalen ? Zullen we hun wonden verbinden bij het afvallen van de schellen ? Onwetendheid wekt jaloezie. Opgestapelde zinsbegoochelingen, regen en modder aan de omlijningen brengen het licht aan het wiebelen.

Schrijlings op de nok, voeten in de ijskoude stroom, zie je de hersenschimmen passeren, de gekeelde scheepsjongens, de onder bladeren bedolven agenda's.
*
Het land zal opduiken uit het boek, de kaart, het geheugen, het zal ons in het oog springen, om de hals, in het gezicht. Een duveltje op een springveer of een gebeitelde patriarch, een vies kaartje of een moederlijke beeltenis, wie kan het voorzien ?

Welke generatie zal erin gelukken terug te keren, de plek te vinden onder het beton, het struikgewas te verbranden, de kuilen onder sneeuw te bedelven, de hand te leggen op de hoogste steen ?
...

L'orage éclate et
brusquement
des hordes de bisons -
leurs sabots trouent
de gros nuages de terre bleue -
traversent l'ocre
de leurs secrets.
Le tonnerre à pierre fendre
et puis la pluie
noie les silex.
Un dieu nous embrasait
le monde entier,
nous dansions nus
dans l'herbe haute.
Et rien dans nos mains
n'arrêtait nos paroles.
Nos cris sont inscrits
dans la mémoire de la peau.
...

Das Gewitter bricht aus
und im Nu
rasen Bisonherden -
ihre Hufe durchbohren
dicke Wolken aus blauem Ton -quer über die Ockerfarbe
ihrer Geheimnisse.
Es donnert Stein und Bein
und dann ertränkt
der Regen die Kiesel.
Ein Gott steckte uns
die ganze Welt in Brand,
wir tanzten nackt
im hohen Gras.
Und nichts in unseren Händen hielt unsere Worte auf.
Unsere Schreie sind eingeschrieben ins Gedächtnis der Haut.

Rüdiger Fischer
...

The Best Poem Of Rose-Marie François

Cerises

Au bout de mes doigts, père,
tes doigts
que j'effleure
presque...
et l'envie des cerises
mûres
trop haut dans le bleu de l'arbre.
Tu m'as hissée jusqu'au miroir...
Ce rouge ce rire à mes oreilles
la pulpe de tes lèvres...
Nous aurions dû savoir
que le ciel
commençait au ras de l'herbe.

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